Un ami qui s'en va...

Un ami qui s'en va... 21/01/2020

L'ami André s'en est allé par une belle journée lumineuse. Benoît lui a rendu hommage avec des mots qui résonnent en chacun.

Hommage à André

Amoureux de la vie.
Il aurait aimé, il aime cette belle journée.
André était un amoureux de la vie. De la sienne certainement, qu’il a traversée avec intensité, travail, amitiés, solidarités, dévouement, sens du partage, de l’accueil, de la justice.
Une vie qu’il a traversée aussi avec une dévotion intelligente et surtout intelligible, c’est-à-dire qui n’emprisonne pas, qui aime la vérité, l’humilité, qui accepte les doutes et se nourrit d’empathie, d’écoute, d’attention ; une dévotion qui refuse l’hypocrisie et les faux-semblants, qui refuse les systèmes, au profit de l’homme et de la femme debout, libres, ni asservis, ni assujettis, d’égal à égale. Une dévotion qui porte un message pas une institution.
Avec gentillesse, bonhommie et simplicité. Une foi qui s’exprime avec des mots clairs, des mots du cœur, des mots qui parlent sans slogans, sans poncifs, inspirés de l’intelligence historique mais libérés du poids de l’histoire, sans sectarisme, sans sentiment de supériorité, sans jugement et sans rejet de la différence, pour ouvrir grandes les portes d’une compréhension de cadre de vie, d’objectifs et d’un avenir meilleur.
Avant-gardiste parfois, courageusement audacieux souvent.
André était un amoureux de la vie des autres aussi. Pour qu’elle soit la plus belle possible, déterminé qu’il était à lutter contre les déséquilibres, à compenser les malheurs, à mobiliser énergies et soutiens, pour tirer vers le haut ceux-là qui peinaient sur les chemins, parce que porteurs d’un handicap, d’un écart social, d’un apprentissage défaillant, d’un excès de quelque chose.
Il mobilisait son énergie et celle de ceux qui avaient les mêmes valeurs, sans aucun prosélytisme, simplement parce qu’il portait en bandoulière, un sens aigu de ce que les écritures qu’il avait étudiées appellent « l’amour du prochain ».
Sans a priori, sans filtre, sans prévention, avec la bonté naturelle qui l’habitait. Certains en ont abusé, cela ne l’a jamais ni découragé, ni abattu. Sa force positive et créatrice a toujours pris le dessus.
Il avait choisi une voie qui sortait des chemins traditionnels, pour déployer, dans un cadre inhabituel, sa charité.
Pied à pied, pas à pas, il a été un des premiers « privé » à s’équiper d’un « Mac » pour permettre à Michel de pouvoir s’exprimer malgré son handicap. Avec plusieurs amis il a initié les échanges de produits et de services, amenant une réflexion sur la qualité et, déjà, sur les circuits-courts, il y a plus de trente ans.
Il a osé le marché fermier et le fameux slogan « manger région, manger saison, c’est manger raison » et quand je l’ai rencontré il y a trente et un ans, une soirée en tête à tête à suffit à créer un lien indissociable entre nous, à tout jamais, il n’y a jamais de hasard. L’amitié est née, le respect mutuel aussi, ils n’ont jamais faibli. Et nous avons ensemble ce soir-là conçu la revue communale de Tintigny.
J’ai découvert, peu à peu et désormais, sa capacité d’émerveillement. Il était émerveillé devant un enfant qui naît et devant sa maman qui a donné la vie, émerveillé devant l’amour de ceux qui s’aiment et dont il accompagnait l’échange de voeux, émerveillé devant une fleur, un paysage, un spectacle, un moment intense partagé, émerveillé devant la créativité, devant un objet façonné, une photo, émerveillé devant une belle écriture, de beaux mots qui chantent, émerveillé par un conte, une poésie, une belle histoire, émerveillé les bras ouverts devant la différence souriante.
Nos relations, ses visions, les miennes et celles de nos amis , nous ont permis d’échafauder des projets porteurs, emblématiques d’une autre façon de vivre, d’un autre modèle d’échanges, d’une solidarité active, respectueuse de chacun, alliant solidarité locale et internationale.
Porté par des équipes magnifiques, par des bénévoles en nombre, un état d’esprit, dont il est le père fondateur, a vu le jour et s’est perpétué, contre vents et marées, contre les attaques et jalousies, à travers toutes les vicissitudes et aléas, guidé avec simplicité par l’intelligence et la générosité du cœur.
Récemment nous travaillions encore sur deux projets et dans un message qu’il m’a adressé en août dernier il m’écrivait ceci :
(…) Trois démons (s’il n’y en avait que trois... ce serait bien !) habitent notre société...
- Les résistances d’une société dominante qui a cultivé le culte du péché et de la mort, du paradis et de l’enfer, sans compter le purgatoire. Ils s’appuient pour survivre sur leurs acquis, sur des civilisations différentes qui sont encore dans pareilles croyances, mais en niant le chemin de l’Europe.
- Les approches d’une réaction qui n’est souvent qu’une “copie” du système dominant et qui reproduit “à l’inverse” les travers des traditions séculaires. Elle “copie” des traditions pour les “adapter”. Elle invente peu une manière différente de vivre. Elle aussi est donc menacée...
- Un mouvement qui se détache de toute recherche.
De plus en plus de personnes ne s’y retrouvent pas dans ces deux philosophies qui chez nous se fragilisent de plus en plus. Ces philosophies ne leur parlent plus et ils vivent en dehors de ces cadres qu’ils considèrent comme l’héritage d’un passé ! Beaucoup ont tendance à fermer la porte à toute recherche d’ouverture, à l’art, à la solidarité, à la rencontre, à la vie, à l’innovation...
Le défi pour demain... ne serait-il pas d’accompagner des personnes à s’ouvrir à d’autres valeurs, d’autres pratiques innovantes...
C’est de notre responsabilité d’oser de nouveaux chemins, de nouvelles expériences, de nouvelles associations pour inventer “avec eux” une autre manière de vivre, d’inventer l’avenir… »
Voilà l’esprit qui l’habitait encore il y a peu et nous en avons reparlé il y a quinze jours à l’hôpital. Un projet d’ouverture d’un lieu à une spiritualité multiple, nous y pensions depuis plus de dix ans. Le mot qu’il aimait utiliser était « un reposoir ». Il en avait nourri l’espoir à Villers-sur-Semois, il n’a pas été suivi et nous échafaudions un projet ici pour offrir du recul, du repos de l’âme et de l’esprit, du resourcement.
Et puis dans ce message du mois d’août, une autre réflexion qu’il m’exprimait ainsi :
« Dans le souci de permettre des chemins différents que ceux qu’on nous impose, je pense que ce serait bien d’avoir un petit espace qui “respire” même quand on “expire” ! Je touche probablement un sujet qui te parle personnellement.
Il y a quelques années, j’avais célébré le départ de Jean-Paul (…) . Nous avons dispersé ses cendres dans un coin de la forêt de Buzenol.
Nos cimetières ont du mal de sentir bon le passage, la vie...(…)
Déjà que le cadre est un endroit fermé, de pierres, de croix, de fleurs plastiques...mais des dizaines de tombes sont à l’abandon !
Je me souviens, j’étais encore jeune, qu’on n’ouvrait pas les portes du cimetière pour des personnes non “pratiquantes”.... On passait leur cercueil au-dessus des murs du cimetière ... »
On réfléchissait à ouvrir un lieu comme celui des arbres du souvenir à Fleurus.
C’était le sujet de nos

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